Gygès le tyran

« Au contact de la bague, ce fut soudain une sensation d’écoulement glacé qui l’insensibilisa un bref instant. Une sève en quelque sorte métallique irrigua sa nuque, puis l’axe osseux de son dos et, de là, circulant par tous les canaux intérieurs, courut jusqu’aux phalanges. Gygès crut qu’il resterait pétrifié pour la vie. Ce n’était pas la torpille des mers qui l’avait mordu, ni la méduse bleue. Il lui semblait plutôt qu’il avait échangé en quelques secondes la totalité de son sang contre une liqueur de sorcier ... »
C’est ainsi que d’une faille de la terre, naquit Gygès le Lydien au VII^e siècle avant notre ère.
Cet Aladin des Grecs n’eut d’autre génie que de se rendre invisible.
Intrigue de sérail pour Hérodote, fable politique pour Platon, cette histoire répète en écho l’avènement du despotisme oriental.

Dessins d’Éliane Hermandez

« L’intérêt du texte d’Antonia Soulez, est bien, on l’aura compris, de confronter et d’interroger des cultures... C’est en cela qu’il enrichit la seule analyse theorique. Il en est comme l’introduction et le contre-point. Il permet surtout à l’auteur de se livrer à une exploration d’images et d’associations métaphoriques (très riches, entre autres, sont les représentations organiques des ensembles totalitaires) qui ne sauraient laisser insensible. »